La baignoire de l'Opéra-Comique
1992
Bois, bronze, velours, coton et garniture de tapissier.
166 x 146 x 180 cm
Acquisition: 1992
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Après avoir été décorateur, styliste et scénographe, Gotscho élabore dans les années 1980 une œuvre plastique dans laquelle l’érotisme des matières (tissus) et le luxe des formes (meubles, accessoires…) s’associent avec désinvolture au naturel le plus élégant des apparences et des illusions. Prenant pour vocabulaire les gestes les plus simples (abandon d’un vêtement sur une chaise, rangement, etc.), il compose des objets hybrides, éléments arrachés à la mode et à la préciosité des décors d’intérieurs, qui s’épanchent dans le théâtre de leur union. Ces mises en scène esthétiques (robes cousues à des chaises, morceaux de meubles s’accouplant, vêtements fusionnant entre eux, etc.) créent des prothèses complaisantes montrant la conformité de notre intimité à des codes sociaux. Ce sont autant de traces inconscientes et symboliques, d’actes et de fantasmes dans lesquels la présence du spectateur vient se dématérialiser dans des effets sophistiqués de lumière.
À travers la légèreté séduisante de ces «collages» surréalisants s’immiscent le malaise et la contrainte de la solitude des corps, de leur absence, de leur incapacité à communiquer et de leur enfermement bourgeois. Ainsi dans la vanité, la richesse et les manières fin XIXe de l’Opéra Comique, deux sièges, dos-à-dos enchâssés dans une baignoire, se touchent sans s’atteindre. Proches et lointains, ces deux somnambules dignes dans leur tombeau paré de velours, semblent narrer l’impossibilité d’un dialogue avec l’autre. Gotscho, au même titre que Nan Goldin ou Cindy Sherman, questionne la fiction de nos représentations publiques où, par excès, se dissout la fatuité de l’être dans le romantisme décadent de la société de consommation.
Maïté Vissault
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