Né à Dugny, Seine-Saint-Denis, (FR). Vit et travaille à Berlin, Allemagne, (DE) et à Paris (FR).
2011
La phrase 'Résister, c'est rester invisible' est écrite à la craie blanche sur un mur blanc.
Craie blanche
Dimension variable
Éd. 2/3 + 1.A.P
Acquisition: 2013
« (…) je cherche à voir et à donner à voir aux spectateurs que le vide est plus qu’une donnée physique dans l’espace. Dans mon travail, le vide n’est jamais innocent. Je l’utilise comme vecteur de sens politique. J’aime à penser le vide dans mes œuvres, en fonction de son “histoire” comme dirait Michel Foucault ».
Kader Attia, entretien avec Régis Durand, en 2008. 1
Photographies, sculptures, installations, films, vidéos, diaporamas, collages tels des raccords de matériaux, d’espaces et de temps divergents, dessins au crayon saisissant des figures humaines dans leur identité sociale ou religieuse, silhouettes d’un présent globalisé, objets récupérés, collectés, éléments d’archives et d’architectures qui font affleurer des histoires coloniales et post-coloniales, livres sauvegardés, extraits de journaux… Il y a dans l’œuvre de Kader Attia, non seulement du protéiforme, du « multi-médium », mais également une accumulation presque insatiable de formes – conflictuelles ou syncrétiques –, de matériaux dé-contextualisés, de dispositifs duels. Une accumulation de paysages mentaux et politiques, de paysages économiques et religieux (Hallal, 2004), de paysages architecturaux qui interrogent le geste moderniste d’un Le Corbusier face à la tradition arabo-musulmane, de mythes et de symboles du contemporain capitaliste. Attia dessine des mises en exposition, dans une esthétique des oppositions et des contraires, et, depuis quelques années, dans une esthétique de la ré-appropriation et, de ce qu’il nomme lui-même, de la « réparation » (The Repair from Occident to Extra-Occidental Cultures, montrée à la dOCUMENTA 13 de Cassel, en 2012). Ce qui est en jeu tant dans ses séries photographiques (La Piste d’atterrissage, 2003) que dans ses installations sur le fil du rasoir de l’imposant et de l’éphémère (Flying Rats, Biennale de Lyon 2005, Holy Land en 2007, ou Ghost en 2009), ce sont des corps, des identités, des sexualités, des religions, des exils et des exclusions, des disparitions et des absences, des savoirs, des césures et des échanges entre culture occidentale et cultures extra-occidentales. Le matériau premier de Kader Attia serait ce plein fragile et chaotique du monde dont la face résistante serait ce vide, ce présent dans les violences, les blessures d’un entre-deux.
L’écriture murale à la craie blanche Résister c’est rester invisible (2011), réalisée dans le contexte des Printemps arabes, à peine visible par le spectateur, qui peut être tracée dans toutes les langues, là où l’installation scripturale est présentée, renvoie à une position philosophique, faisant de l’acte de résistance un acte quotidien et souterrain, un «acte naturel plutôt que culturel» 2.
Formé, au début des années 1990, à l’École supérieure des Arts appliqués Duperré (Paris), puis à l’École nationale supérieure des Arts décoratifs de Paris, ainsi qu’à l’Escola de Artes Applicades « La Massana » (Barcelone), Kader Attia vit dans sa biographie personnelle cet entre-deux, qui nourrit ses recherches: entre une culture arabo-musulmane transmise par ses parents algériens, immigrés en France, et une culture occidentale libérale et excluante… Il faut être entre… pour formaliser une possible réparation…
Marjorie Micucci
1 Catalogue de l’exposition Black & White : sign of times, Centro de Arte Contemporàneo Huarte, Huarte, Espagne. Textes de Régis Durand, Octavio Zaya, Hannah Feldman. 2008.
2 Propos de l’artiste lors de son exposition personnelle Essential, à la Galleria Continua, San Gimignano, Italie, du 11 février au 31 mars 2012.
Site de l’artiste : www.kaderattia.de
À consulter : Kader Attia RepaiR, sous la direction de Léa Gauthier, BlackJack Éditions, Bruxelles, 2014 pour l’édition anglaise, 2015 pour l’édition française.