Né en 1969 à Montpellier (FR). Vit et travaille à Paris (FR).
2005
Néon, transformateur, programmateur et calendrier.
315 cm de long, 1 cm de diamètre
Acquisition: 2006
De prime abord, l’œuvre pourrait évoquer un hommage à l’art minimal, dont on ne retiendrait que la froide référence formelle… À moins d’avoir la chance d’apercevoir le rayon vert du titre, référence à celui qui trace parfois sur la mer un fugace liseré coloré. Chaque jour en effet, ce long néon, placé à hauteur du regard comme une ligne d’horizon, s’allume une seconde à l’heure précise du coucher du soleil, calculée en temps universel par le Bureau des Longitudes de l’Observatoire de Paris (car déterminée selon les coordonnées géographiques du lieu d’exposition). Il rejoue ainsi le mystérieux phénomène dont la rareté en fait un objet de fascination et de superstition – au même titre que les aurores boréales ou les étoiles filantes -, et ce bien qu’il soit scientifiquement expliqué par une diffraction de la lumière passant à la surface de l’eau. L’œuvre témoigne de l’attention portée par l’artiste aux manifestations physiques, qu’elles soient optiques, météorologiques, magnétiques, etc. Comme dans ses daguerréotypes de nuages, Evariste Richer semble vouloir saisir l’éphémère et l’impalpable. Au risque de l’objectiver ? Un néon, un programmateur, un calendrier, deux secondes quotidiennes de lumière électrique verte : le phénomène naturel se trouve ici artificiellement reproduit à l’aide d’objets triviaux, déconcertants de rationalité. Pourtant, l’émotion demeure. En plaçant le spectateur dans une situation d’attente, le dispositif réinvestit l’événement de sa précieuse magie. Selon la saison et le lieu d’exposition, l’œuvre génère une insoluble frustration pour le visiteur qui ne pourra se trouver en sa présence au moment voulu. En ce sens, la fulgurance poétique du Rayon vert entre en résonance avec le film The Green Ray (2001) de Tacita Dean et plus encore avec la Lampada annuale (1966) d’Alighiero e Boetti, boîte lambda contenant une ampoule qui ne s’allume qu’une fois par an, nul ne sait quand. Car c’est bien la dimension temporelle qui est au cœur de l’œuvre d’Evariste Richer. Réglée, cyclique, implacable, l’apparition ne s’en décale pas moins tous les soirs avec l’horaire changeant du coucher du soleil, nous faisant prendre la mesure de l’inexorable.
Marie Cantos
Notice rédigée pour l’ouvrage monographique Evariste Richer / Slow Snow, coédité par La Galerie, Centre d’art contemporain de Noisy-le-Sec, le 49 Nord 6 Est, Frac Lorraine, la galerie schleicher+lange et les Editions B42 avec le concours du Centre national des arts plastiques, Ministère de la culture et de la communication (aide au premier catalogue).