Né en 1939 à Brooklyn, New York (US)
Vit et travaille à Albuquerque, New Mexico (US)
1983
Photographie noir et blanc, tirage argentique
70 x 70 cm
Acquisition: 1988
Joël-Peter Witkin met en scène dans ses photographies noir et blanc d’extravagants personnages, aux corps déformés ou déviants. Une femme masquée allaite une anguille, un homme s’enfonce un clou de 20 cm dans le nez, un être transgenre est soumis aux assauts sexuels d’un chien… Autant de contes morbides, reliques d’une bizarrerie intemporelle, qui tendent à démontrer que «la beauté est une notion culturelle et sociale, et toujours le fruit d’une propagande»1. Avant l’ère du numérique, Witkin a inventé un monde qui se déjoue de tout canon moral ou esthétique. Il définit son rôle comme «celui d’un chaman, un prêtre et un mystique, capable d’assumer l’impérieux dialogue entre le visible et l’invisible»2. Prolongeant l’enseignement de photographes comme Weegee et Diane Arbus, fascinés par le crime et l’anormal, le photographe américain pousse à bout leur démarche, allant jusqu’à utiliser des cadavres dans ses «tableaux vivants». Fermant le studio d’un drapé gris, Witkin détache ces «freaks» de toute réalité, rajoutant à leur caractère improbable. Grattés, raturés, tachés d’émulsion, ses clichés miment une certaine peinture : représentatif du post-modernisme des années 80, il rend fréquemment hommage à de grands peintres tels Miró (ici cité ouvertement dans “Sins of Miró”), Bosch, Géricault, Goya, Vélasquez, et mêle ces références à de grands mythes ou à des récits tirés de la Bible.
Emmanuelle Lequeux
1 Joël-Peter Witkin, catalogue de l’exposition, Museum of modern Art de Haifa (Israël), 1991.
2 Idem.