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Claude Rutault

Né en 1941 aux Trois-Moutiers (FR)
Vit et travaille à Vaucresson (FR)


Sol / Mur / Plafond / Mur, définition-méthode n°103

1979
Matériaux et dimensions variables
Acquisition: 1992


Définition/méthode n°103
Utilisation simultanée du sol, du plafond et des murs se faisant face.
1) les éléments au sol A,B,C,D, sont dans le même matériau que le sol.
2) l’élément E est une toile tendue sur châssis peinte de la même couleur que le mur sur lequel elle est accrochée.
3) les éléments au plafond F,G,H,I, peuvent être de plusieurs matériaux, cela sera fonction du lieu et la solution la plus facile à mettre en œuvre sera retenue. Ces éléments seront peints de la même couleur que le plafond.
4) l’élément I étant un élément d’angle d’un seul morceau sera selon toute vraisemblance une plaque de métal pliée, la partie au fond étant peinte de la même couleur que le mur.
Les autres éléments de la réalisation seront choisis au moment de la mise en œuvre.

La proposition Sol/Mur/Plafond/Mur a pour argument la mobilisation de tous les types de surface du lieu de sa réalisation. En effet, elle prescrit la disposition, sur le sol, de quatre éléments faits dans le même matériau que leur support ; elle programme l’accrochage, sur un mur, d’une toile tendue sur châssis peinte de la même couleur que ce mur ; elle préconise le placement, au plafond, de quatre éléments, dont le matériau, d’une part, est laissé au choix du preneur en charge de la pièce et, d’autre part, peut varier d’un élément à l’autre ; elle prévoit, enfin, l’installation, à l’angle du plafond et du mur, d’un élément, une plaque de métal pliée, par exemple, dont la partie qui se trouvera contre le plafond sera peinte de la même couleur que celui-ci et la partie qui se trouvera contre le mur sera peinte de la même couleur que ce dernier.
Le premier effet de pareille proposition, c’est l’égalisation de l’espace expositionnel. Car, non seulement aucun type de surface (mur, plafond, sol) n’est oublié, mais, en outre, tous les éléments employés entretiennent avec leurs supports respectifs un rapport de même ordre, mimétique, en l’espèce. Pareille déhiérarchisation du lieu de monstration est encore accrue par la parité du nombre d’éléments se trouvant au sol et au mur. Enfin, avec l’introduction d’un élément hybride d’un point de vue topique, une plaque de métal pliée, à cheval sur le mur et le plafond, telle conséquence de l’égalisation de l’espace expositionnel est tirée : puisque mur et plafond se valent, il n’est point besoin de changer d’objet pour passer de l’un à l’autre.
Le second effet, c’est l’égalisation de la peinture et de la sculpture obtenue. Tout d’abord, cette pièce est un mixte puisqu’elle associe des éléments caractéristiques des domaines pictural et sculptural : une toile peinte tendue sur châssis au mur et des plaques de tel matériau (ciment, bois, pierre, par exemple) ou morceaux de moquette ou de linoléum au sol. Ensuite, ce sont certains des éléments mobilisés qui, selon les choix de réalisation adoptés, pourront fonctionner comme mixtes ; il en irait ainsi d’éléments au plafond, nettement tridimensionnels et peints, à l’instar de la toile voisine, de la même couleur que le support. Enfin, les éléments représentatifs du genre sculptural et celui emblématique du genre pictural établissent avec leurs supports respectifs un rapport analogue : les plaques ou morceaux de revêtement ressemblent au sol sur lequel ils sont posés tout comme la toile peinte ressemble au mur sur lequel elle est accrochée. Or, si peinture et sculpture peuvent ainsi être soumises à un même traitement, c’est en raison de l’existence entre elles de certaines similarités : l’une et l’autre peuvent avoir comme support direct telle surface du lieu de leur mise en montre, l’une et l’autre peuvent mimer ce support et l’une et l’autre peuvent même être des objets homologues. Si les éléments au sol sont des plaques de ciment et que la toile au mur a les mêmes dimensions, dans ce cas, l’échange auquel le spectateur sera invité à procéder sera tout simplement celui de deux parallélépipèdes. En d’autres termes, avec la confrontation de telle toile et de telles plaques, la différence entre peinture et sculpture se trouve relativisée, la toile tendue sur châssis apparaissant pour ce qu’elle est, un objet tridimensionnel, et non comme le simple support de traces picturales.
Ainsi, avec Sol/Mur/Plafond/Mur, est-ce parallèlement que le lieu d’exposition et la toile tendue sur châssis adviennent au regard dans leur définition volumétrique.

Michel Gauthier