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Thomas Grünfeld

Né en 1956 à Opladen (DE)
Vit et travaille à Cologne (DE)


Misfit (fox-terrier, renard, biche)

1996
Assemblage d'animaux taxidermisés
55 x 40 x 40 cm
Acquisition: 1997


Critique ironique du bon goût allemand – la « gemütlichkeit »-, Thomas Grünfeld se passionne pour la décoration intérieure. Il réalise des « tableaux-étagères » ou encore des « tables-juponnées » ainsi que des poufs à la fonctionnalité improbable. Puis il compose ses premiers misfits, sorte de bestiaire inspiré de contes et légendes populaires bavarois, les volpertigers et fait œuvre de taxidermiste. Ses misfits, véritables sculptures, sont des spécimens empaillés dont les configurations mélangent plusieurs espèces animales. Souvent exposés dans une vitrine, ces animaux hybrides s’inscrivent parfaitement dans la tradition des cabinets de curiosité de la renaissance qui traduisaient tous un intérêt particulier pour les phénomènes étranges, qu’ils soient naturels ou artistiques.

Le misfit acquis par le Frac Lorraine est un savant mélange entre le fox-terrier, la biche et le renard. Le sentiment naissant à la vue d’un tel animal est déroutant et très certainement lié au paradoxe existant entre ce que nous croyons reconnaître, un animal familier, et ce qui est réellement, une sorte de chimère. (…)

L’œuvre de Thomas Grünfeld s’inscrit dans une démarche artistique commune à un certain nombre d’artistes des années 1990 pour lesquels l’animal, reflet de la nature profonde de l’homme, pose des questions existentielles. Support privilégié de l’artifice ou du trucage (la Garde Républicaine ou le Palais de Xavier Veilhan), ou encore emblème (le chat d’Alain Séchas), l’animal offre également un véritable champ d’expérimentations, à l’image des œuvres taxidermistes de Wim Delvoye, ou plus radicalement encore, des œuvres de Damien Hirst qui n’hésite pas à exposer un requin-tigre grandeur nature, flottant dans du formol.

À travers les animaux hybrides qui composent sa galerie de l’évolution, c’est un regard sur nous-mêmes que Thomas Grünfeld nous incite à porter, sur notre condition d’être humain, notre inéluctable évolution. (…)

Tout comme nous le ferions dans un muséum d’histoire naturelle, nous déambulons dans un univers étrange et presque inconnu. Mais en lieu et place du diplodocus, nous découvrons par-delà les vitrines un animal aussi peu familier que le misfit. Création artificielle, cet animal est déroutant. Dérangeant, instrumentalisé, il est porteur de toutes sortes de fantasmes et ouvre la porte à un univers onirique dans lequel resurgissent aussi nos angoisses les plus profondes. Ses différentes hybridations animalesques ne sont pas sans résonance avec l’actualité scientifique, avec les manipulations et diverses mutations génétiques.

Line Herbert-Arnaud