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Katie Paterson

Née en 1981 à Glasgow (GB). Vit et travaille à Londres (GB)


Inside this Desert Lies the Tiniest Grain of Sand

2010
Épreuve gélatino-argentique
84 x 100 cm
Acquisition: 2013


« Voir un Monde dans un Grain de Sable », William Blake 1

Chacun des dispositifs imaginés par l’artiste écossaise Katie Paterson donne accès, établit une écoute au plus imperceptible qu’est la disparition, diffracte des temps, des espaces et des distances. Accès et écoute à ce que l’infiniment grand et l’infiniment petit, par leur immensité qui se répond, recèlent d’invisible, d’inaudible, d’illisible, d’impossible à notre perception humaine. Ce que l’œil et l’oreille corporels ne peuvent saisir dans une médiation des seules apparences. Formée à l’Edinburgh College of Art et à la Slade School of Fine Art de Londres, Paterson fait se succéder des idées-projets collaboratifs (avec des astrophysiciens, des astronomes, des écrivains…), qui prennent à la fois comme « réflexion », comme « expérience », comme « matériau » et « point d’accélération » de l’imagination, l’infinité des phénomènes cosmiques et géologiques, l’infinité des temps possibles, des temps humains aux temps-distances de l’univers, des temps paléontologiques et historiques aux temps écologiques. Katie Paterson appartient à cette génération d’artistes né-e-s au début des années 1980 en prise avec l’urgence des enjeux environnementaux et s’inscrit dans une généalogie de l’art conceptuel et de l’art éco-environnemental des années 1960-1970. Utilisant les modalités éprouvées du Mail Art ( The Dying Star Letters , 2010), de l’art sonore ( Vätnjökull (the sound of) , 2007 ; Earth-Moon-Earth (Moonlight Sonata Reflected from the Surface of the Moon) , 2007) ou encore d’un « art cartographique », Paterson fait acte de transmission et de dévoilement grâce à une « économie poétique » par laquelle art, science et technologie se nourrissent réciproquement.

Lorsqu’elle conçoit Inside this Desert Lies the Tiniest Grain of Sand (2010), Paterson questionne encore les distances, les disparitions, les échelles temporelles, rendant le temps et les infinis à une provisoire et poétique visibilité ou à un instant t., qui est celui de l’œuvre. Ainsi pour Inside this Desert… l’artiste a fait tailler par des spécialistes des nanotechnologies un grain de sable recueilli dans le désert du Sahara, à la plus petite dimension aujourd’hui possible (soit 0.00005 mm). Ce fragment de grain de sable étant enseveli par Paterson quelque part dans ce même paysage de dunes instables, dont la photographie en noir et blanc expose non pas tant le témoignage d’un geste performatif que la mesure poétique du corps de l’artiste conjugué au titre de l’œuvre : « À l’intérieur de ce désert repose le plus petit grain de sable ».

Marjorie Micucci

1 « Voir un Monde dans un Grain de Sable / Et un Paradis dans une fleur sauvage, / Tenir l’Infini dans la paume de ma main / Et l’Éternité dans une heure (…) », William Blake, Fragments from Auguries of Innocence, circ. 1803, in Auguries of Innocence and Other Lyric Poems, CreateSpace Independant Publishing Platform, 2014. Traduction établie par nos soins – « To see a World in a Grain of Sand / And a Heaven in a wild flower, / Hold Infinity in the palm of your hand / And Eternity in an hour (…) ».

2 Site de l’artiste